Dclic-média: Bonjour Clément, et merci de nous recevoir. Pour commencer, dis nous en plus sur toi.
Clément Corsi : Et bonjour Dclic ! C’est un plaisir qu’on puisse discuter ensemble. Alors moi c’est Clément Corsi, je fais de la photo depuis… 2004 pour être exact. Et actuellement je suis déclaré photographe-auteur : c’est-à-dire que je vends mes photos plutôt que mes services de photographe.
DClic: Tu as toujours fait des photos de portraits artistiques ?
CC : Alors non, j’ai d’abord essentiellement fait de la photo de paysages et d’architecture. Le côté pratique de ne dépendre que de soi pour s’adonner à la photo et améliorer son œil ainsi que sa technique. Et puis comme je suis de nature très curieux au niveau artistique, j’ai commencé à faire du portrait en 2009 et ce n’est que très récemment – enfin récemment, 2016 quand même – que j’ai commencé à me tourner vers la photo intégrant du bodypainting. J’aime beaucoup travailler sur des thèmes comme le regard sur soi, la confiance.
Mais je n’ai pas abandonné la photographie de paysages ou d’architecture pour autant. J’ai la chance d’avoir un métier qui me permet de me déplacer assez régulièrement et d’aller à la rencontre de lieux tous plus beaux les uns que les autres.
Dclic : Quel est le principe d’être photographe-auteur ?
CC : alors c’est que je vends mes œuvres et non ma prestation. Je ne dépend que de mes idées et de ma vision de la photo, je vends le fruit de mon investissement dans la photo, de ce que je crée avec mes modèles ou l’existant. Je ne vends pas mes services.
je ne souhaite pas devenir photographe de services… je trouve que, par exemple, la photographie de mariage impose un cadre trop strict à mon sens. Alors oui, il faut de la créativité, mais on dépend de ce que les mariés souhaitent, d’un certain “standard” photographique lié à la prestation de mariage. Il y a aussi un attendu en termes de résultat. La photographie de mariage est belle, c’est un panel de la photographie intéressant, mais qui ne me convient pas dans ma pratique artistique de la photographie… et puis il y a déjà tellement de photographes de mariages très bons, des vraiment bons dans ce domaine.
Je ne veux pas m’imposer ça, je préfère livrer ce que je crée avec ma vision et sans cette pression.
Dclic : Quelle est ta vision de la photo justement ?
CC : Un instant. C’est un instant suspendu. On se trouve sur un instantané, on immortalise un moment de la personne, le moment où elle est la meilleure d’elle-même dans ce que j’imagine de la photo que je veux obtenir.
Quand je décide de faire un shooting avec une modèle, j’ai déjà une idée de la photographie que je veux faire et je vais tout faire pour me rapprocher le plus possible de ce que je veux en terme de qualité, de rendu.
Je dirige la modèle, mais généralement j’aime bien prendre des instants volés. C’est là que l’on est tous meilleurs : dans la spontanéité.
D’ailleurs généralement les shootings sont “rapides”, si on peut dire, avec moi. Généralement un shooting tout compris dure 1h environ. Durant mes expériences, j’ai compris que plus le shooting dure, plus notre talent décroît. Ce que je veux dire, c’est que l’on n’est bon que sur un instant court de notre performance, autant le photographe que la modèle.
Dclic: Il me semble que tu fais également de l’argentique ?
CC : Oui j’en fais effectivement. Ce que j’aime dans l’argentique c’est qu’il faut avoir l’œil et avoir déjà une maîtrise de son appareil photo. Au prix des pellicules et du développement, on ne peut pas se permettre de faire et refaire la même photo, tout le contraire du numérique en soi. Après, dans ma vision j’estime qu’aucune photo n’est jamais ratée, elle est la représentation d’un moment quel qu’il soit : elle est une vision, qui n’est peut-être pas celle que l’on souhaitait, mais c’est tout de même une création. Bon, mon côté perfectionniste me fait parfois dire le contraire dans ma tête. Mais j’ai appris cela quand des photos, que je considérais comme moins bonnes que d’autres, ont remporté des concours : c’est qu’elles ont bien trouvé un écho dans certaines personnes.
C’est en cela que si je devais résumer : le numérique est une chance, l’argentique un challenge.
Dclic: Est-ce qu’il y a des photographes qui t’inspirent dans ta pratique ?
CC: Alors oui, beaucoup et pas que des photographes !
Mais si je devais en citer quelques uns, je dirais, incontournable pour son regard sur la photo de rue, Robert Doisneau. Un autre photographe que je pourrais citer, c’est Peter Lindbergh pour sa façon de traiter l’image dans la mode et la façon de mettre de l’émotion dans ses portraits.
Mais sinon, je trouve également de l’inspiration dans les œuvres de Eugène Atget. Ses photographies de Paris m’ont énormément inspiré quand j’ai commencé la photographie d’architecture.
Mais je pourrais aussi citer Marc Lagrange, plus contemporain, dont j’apprécie particulièrement le travail.
Dclic : Dernière question en lien avec l’actualité numérique, puisque tu travaille dans l’informatique : l’IA fait beaucoup parler d’elle en ce moment, dont certaines qui sont capables de recréer des images ultra réalistes. En tant que photographe, qu’en penses-tu ?
CC: Vaste sujet… Alors pour commencer je dirais que tout ce qui est nouveau fait peur. Le numérique a fait peur à l’argentique – et a été décrié au départ.
Deux choses surtout : à titre personnel, je ne suis pas contre. Je sais que certains créateurs numériques décident de boycotter ces applications de création, car se pose surtout la question de la propriété intellectuelle. Il faut savoir que l’IA c’est au commencement une énorme base de données : elle tire toutes ses facultés des serveurs et stockage de données. Et donc dans ces bases de données et par leurs capacités de recherches, il y a des images qui relèvent de la propriété intellectuelle. Il y a des sites qui interdisent la vente d’images créées par l’IA car on recense justement des atteintes aux droits d’auteur.
Ce qui fait peur c’est surtout ce que l’on ne connaît pas vraiment. Actuellement l’IA n’en est qu’à ses débuts, je suis très intéressé de voir ce qu’elle va devenir dans quelques années. Car ça peut aussi être un formidable outil à notre service.
On pourrait en parler pendant des heures car c’est un sujet passionnant. La technologie va tellement vite qu’elle en devient presque éphémère. Prenons l’exemple des réseaux sociaux, on ne trouve pas le même public selon les réseaux que l’on fréquente. En terme d’âge je veux dire, et on peut vite être dépassé par cela. C’est en ce sens que je pense que certaines personnes ont peur de l’IA, c’est une technologie qui nous paraît obscure, les générations qui seront nées avec n’auront plus cette crainte… bien au contraire. Tout est une question de contrôle et de limite après, mais ça c’est un autre débat.
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